LES ENJEUX DE LA FORMATION

Les enjeux de la formation, son déroulement et les conditions de passage des épreuves de l’examen

En favorisant l’aspect social de l’éducation, ce dispositif de formation privilégie la création de liens entre les différents contenus de savoirs et les interrelations entre élèves et enseignants. En soutenant le développement de l’autonomie par l’appropriation des savoirs, la pédagogie de l’alternance met l’accent sur l’apprentissage constructif et actif. Susceptible de réduire le risque de dépendance à l’égard de la formation et du formateur, cet apprentissage à partir de l’expérience, offre à l’apprenant, la possibilité de se dégager progressivement du soutien affectif qui lui a été nécessaire.

  • Lecture didactique du dispositif de formation préparatoire aux épreuves du permis de conduire de la catégorie B

Les connaissances générales nécessaires au déplacement-citoyen sont relatives aux trois éléments constituant le système routier : homme-véhicule-environnement. Si le Code de la route organise l’environnement routier, les aspects dynamiques et mécaniques sont en rapport avec le véhicule, alors que les aspects physiologiques, psychologiques, sociologiques, juridiques, ceux relatifs à la santé publique et à l’écologie sont en lien avec le comportement de l’usager.  Pour aider l’apprenant à créer des connexions entre les différents savoirs, nous avons suivi le modèle théorique du psychologue John Robert Anderson (1985) qui distingue trois stades dans l’acquisition des habiletés.

 

Le stade départ ou cognitif 

Pour circuler en sécurité, le conducteur doit s’adapter aux exigences du système routier. Dans la construction des compétences de base, ce sont les critères contenus dans le Référentiel d’Activités pour une Mobilité citoyenne qui vont permettre à l’apprenant d’articuler le contrôle du véhicule au contrôle de la personne. Si les règles du Code de la route représentent les fondements de l’apprentissage, la conduite prudente est, quant à elle, en étroite relation avec le comportement du conducteur. Le savoir-faire ou savoir conduire procède donc du genre technique et cognitif.

  • Le genre technique

La construction des compétences de base commence par la découverte du poste de conduite. Puis apprenant à manipuler les commandes, le conducteur novice acquiert les automatismes nécessaires pour maîtriser l’allure et la trajectoire du véhicule. En prévenant l’accident, ses occupations sur la voiture sont d’ordre social, alors que ses préoccupations personnelles relèvent de son fonctionnement cognitif.

  • Le genre cognitif

L’apprentissage sensori-moteur qui accompagne l’acquisition des automatismes tend à développer les processus mentaux ou cognitifs de l’apprenant. Les sensations étant provoquées par différentes stimulations de l’environnement routier, l’élève apprend déjà à « regarder où il va » et non l’inverse. Pour éviter la surcharge mentale, il apprend à sélectionner l’information, afin de ne pas encombrer son cerveau d’informations inutiles. A contrario, il doit se rendre compte que la sous-charge mentale peut diminuer son attention en provoquant une déconnexion de l’esprit. Sollicité en fonction des priorités, le processus attentionnel prête toutefois intérêt à d’autres stimulations. Lorsque l’élève est concentré, c’est la vigilance et l’attention soutenue, qui sont mobilisées. Dès lors qu’il effectue une double ou triple tâche (contrôler l’allure et la trajectoire du véhicule, et traiter l’information), l’attention est sélective puisqu’elle est divisée entre plusieurs actions. Ces deux dimensions du processus attentionnel influencent le temps de réaction. Cet intervalle qui s’écoule entre la prise d’information et l’action est évalué à une seconde. Le temps de réaction qui est une contrainte temporelle extrêmement courte sert d’étalonnage à l’échelle temporelle de l’environnement routier.  Pour assurer sa sécurité et celle des autres, le conducteur novice apprend à développer des stratégies cognitives, par exemple, planifier l’action par anticipation, ou encore interpréter les intentions des autres usagers et les rendre compatibles avec les siennes. Il doit aussi contrôler ses états émotionnels afin que sa décision ne soit pas altérée par le sentiment de peur ou de colère pouvant alors affecter son jugement. Pour s’adapter aux situations dynamiques, il doit agir dans le feu de l’action.

 

 

Le stade associatif succède au stade cognitif 

Dans la construction des compétences complexes, le « savoir conduire » se combine au « savoir se conduire ». Si le premier est en rapport avec le genre technique, le second, rattaché à la dimension humaine, suppose des compétences sociales. En effet, pour arriver à destination sans encombre, le conducteur novice doit apprendre à coopérer et à partager l’espace routier avec autrui. Voilà donc ce qui absorbent son esprit. N’ayant aucune alternative, et se retrouvant dans l’impossibilité de choisir entre ses occupations sociales et ses préoccupations personnelles, il apprend à gérer l’équilibre du système routier en adoptant la posture de l’entre-deux.

 

  • Le genre social 

La posture de guide : pour devenir responsable de la sécurité, il apprend à réguler le trafic.  Ce qui équivaut à :

  • Conserver son calme de manière à pouvoir reprendre en main une situation dangereuse.
  • Ne pas se mettre en colère afin de rester attentif à son travail.
  • Gérer les interruptions de tâche perturbant le déroulement de l’action.
  • Réduire la complexité de la tâche de manière à économiser ses ressources.
  • Gérer la pression temporelle.
  • Utilise la signalisation comme repère temporel.
  • Répartir de façon équilibrée le temps consacré au contrôle du véhicule et au traitement de l’information.
  • Maîtriser ses gestes.
  • Développer le processus perceptif et attentionnel.
  • Neutraliser ou replanifier une autre action en cas de besoin.
  • Réagir aux situations imprédictibles sans passer par l’analyse, uniquement par la reconnaissance visuelle ou auditive des signaux de danger.

La posture de médiateur : pour être en interrelation avec l’environnement routier, en interaction avec son véhicule et en intersubjectivité avec l’ensemble des usagers, il apprend à réduire la complexité de la tâche de conduite. A cette fin, il doit :

  • Organiser les procédures de l’action.
  • Classer les situations conflictuelles de l’environnement dynamique selon leur traitement.
  • Aider au libre passage en aidant les usagers à terminer ce qu’ils avaient commencé.
  • Anticiper l’activité d’autrui.
  • Interpréter les intentions des autres usagers et les rendre compatibles avec les siennes.
  • S’associer à l’activité des autres usagers en coopérant avec eux.
  • Tenir compte des piétons et pas seulement des véhicules motorisés.
  • Protéger ses intentions contre les intentions compétitives.
  • Changer d’intentions.
  • Se détacher physiquement et/ou mentalement de l’activité d’autrui.

À ce stade, le conducteur novice s’étant mesuré à lui-même et aux autres acquiert bien des capacités sociales. En prenant des habitudes, la confiance s’installe. Il pense alors être en mesure de se présenter à l’épreuve pratique du permis de conduire. Or, toutes les connaissances n’étant pas complètement intériorisées, il n’est pas encore autonome.

Le dernier stade ou stade autonome

Dans la construction des compétences transversales, l’expertise continue de croître. En variant les supports pédagogiques, nous favorisons le transfert de connaissances (conduite dans les environnements dégradés, conduite de nuit, conduite en montagne, trajets inconnus). Si les conditions ne le permettent pas (neige, verglas, pluie), les conseils de prudence sont revus au travers des notions théoriques.

La connaissance étant automatisée, donc machinale, le conducteur novice est capable de faire une double ou triple tâche, par exemple tenir une conversation en conduisant, faire des visions directes sans dévier de sa trajectoire ou encore changer d’intentions sans perdre le fil de la circulation. En utilisant des représentations schématiques et des plans d’actions, ses occupations sont alors réalisées avec un faible contrôle attentionnel, ce qui accroit le traitement de l’information. En ayant conscience des risques, il s’adapte non seulement aux situations dynamiques, mais aussi à l’évolution technologique du véhicule. Par conséquent, il coopère aussi bien avec les usagers que les systèmes électroniques embarqués. En combinant les compétences de base et complexes aux compétences transversales, il conjugue les règles civiques aux règles sociales. Par exemple, lorsqu’il n’a pas la priorité, il a suffisamment d’habileté pour arriver au bon endroit au bon moment. En jouant avec le temps, il évite les arrêts inutiles et par conséquent les démarrages aussi, réduisant ainsi les émissions de CO2. Cette capacité à gérer la pression temporelle permet au problème de disparaître, ou encore le rend évident, donc facile à comprendre. Lorsque le conducteur novice décélère, c’est qu’il a conscience qu’en retardant son arrivée sur l’obstacle, la situation pourrait évoluer en sa faveur. Il sait aussi contrôler les interruptions de tâche sans être submergé par le sentiment d’émotion.

Dès lors qu’il maîtrise les situations simples et complexes de l’environnement routier, et qu’il s’adapte à l’expertise des conducteurs expérimentés, dont le savoir-faire est différent du sien, il a donc un comportement autonome. En conséquence, il sera présenté à l’examen du permis de conduire.